Avec encore 11 millions de foyers chauffés au gaz, la guerre en Ukraine questionne la souveraineté énergétique de la France, et plus largement de l’Union européenne, vis-à-vis du gaz russe. Le pays possède-t-il des ressources suffisantes pour passer l’hiver ? Quelles sont les mesures pour garantir son indépendance énergétique ?
Les origines du gaz en France et en Europe
Afin d’assurer son approvisionnement en gaz naturel et couvrir les besoins de la population, la France se fournit auprès de différents pays. Ne produisant pas de gaz sur son propre sol, il est alors nécessaire pour elle de le faire importer. Toutefois, afin de prévenir tout risque de pénurie, le pays mise sur la diversité des importations.
Ainsi, la France s’appuie sur de nombreux fournisseurs, dont deux principaux qui représentent plus de la moitié des importations (chiffres de 2019) :
- La Norvège, qui est le principal fournisseur de gaz naturel avec 36 % des importations. Un chiffre qui tend à augmenter ces dernières années.
- La Russie, au cœur des tensions actuelles concernant l’approvisionnement du gaz, qui fournit de son côté environ 20 % du gaz.
Le reste des importations de gaz provient ensuite majoritairement des Pays-Bas, du Nigéria, de l’Algérie et du Qatar.
Malgré ses 20 % d’importation, la France fait partie des trois pays d’Europe qui dépendent le moins du gaz naturel russe. Juste en-dessous se trouvent la Slovénie avec 12 % d’importation et le Royaume-Uni avec 7 %. A contrario, l’Allemagne importe 51 % de gaz à la Russie et la Finlande, 97 % !
Enfin, certains États, comme la Slovaquie, la Lettonie, l'Estonie et la République Tchèque en dépendent à 100 %.
Si ce chiffre, souvent mis en avant, peut sembler conséquent, il est le résultat d’une grande disparité entre les pays. Certains sont ainsi complètement dépendants du gaz russe, faisant logiquement augmenter cette moyenne.
Hiver : le taux de remplissage des stocks de gaz français
Depuis plusieurs années, la France s’impose comme étant un des pays ayant le meilleur taux de remplissage de ses stocks de gaz naturel. Ainsi, au 1er novembre 2021, les stocks français atteignaient un taux de 94,5 %, nettement supérieur à la moyenne européenne de 75 %.
Constitué pendant l’été, ce stockage, situé dans des cavités souterraines, doit permettre aux pays d’Europe de chauffer leurs bâtiments pendant l’hiver et faire tourner leurs industries au cours de l’année. Ce flux de combustible doit permettre de garantir l’approvisionnement du pays à toute période de l’année, lors de pics de consommation ou de crises géopolitiques.
C’est pourquoi, face à un risque de pénurie accru, et de coupure des importations de gaz russe, la France est dans l’obligation de sécuriser le plus rapidement ses stocks de gaz pour l’hiver 2022 / 2023.
Si la France reste attentive au taux de remplissage des stocks de gaz, celui-ci reste rassurant et doit permettre d’atteindre les 85 % minimum.
En cas où l’hiver se révélait particulièrement rude, l’État n'exclut pas de réduire la consommation en gaz des grands consommateurs industriels. De leurs côtés, les services publics essentiels et les particuliers ne sont, pour le moment, pas concernés par des coupures ou restrictions.
REPowerEu, le plan pour l’indépendance énergétique
Afin de garantir la souveraineté énergétique de l’Union européenne, et donc la sortie de sa dépendance au gaz russe, la Commission européenne a présenté le 18 mai 2022 son plan REPowerEU. Avec un budget de 300 milliards d’euros, celui-ci vise une indépendance énergétique d’ici 2027, en misant notamment sur les économies d’énergie et le renouvelable.
👉 Les économies d’énergie
Celles-ci sont en effet le moyen le plus sûr, mais aussi plus rapide et moins coûteux, de faire face à la crise énergétique actuelle. Ces économies concernent aussi bien les bâtiments que le transport ou l’industrie.
Par exemple, elle entend augmenter l’objectif contraignant en matière d'efficacité énergétique du “Fit for 55”, initialement fixé à 9 %, à 13 %. Le “Fit for 55” est un ensemble de mesures visant à réduire de 55 % les émissions de gaz à effet de serre de l’Union européenne d’ici 2030, par rapport à 1990.
👉 Le recours aux énergies renouvelables
L’une des ambitions principales du plan REPowerEU est le recours massif aux énergies renouvelables. Ainsi, l’objectif européen de neutralité climatique à l’horizon 2050, qui fixait à l’origine la part du renouvelable à 40 % dans le mix énergétique européen d’ici 2030, passe finalement à 45 %.
La capacité totale de production de ces énergies équivaudrait de cette façon à 1 236 GWh, contre 1 067 à l’origine. Par ailleurs, REPowerEU prévoit de doubler la capacité solaire photovoltaïque d’ici à 2025.
Enfin, l’Union européenne parie sur les gaz verts. Un plan d’action sur le biométhane doit permettre de porter la production de ce combustible à 35 milliards de m³ d'ici à 2030. De même, l’hydrogène doit suivre un objectif de 10 millions de tonnes de production intérieure.
La diversité des importations de gaz de la France lui permet, aujourd’hui, de se passer du gaz russe à court terme. Toutefois, à plus long terme, le recours aux énergies renouvelables, voulu par REPowerEU, mais aussi la sobriété énergétique, s’imposent comme les meilleures solutions pour l’indépendance énergétique !
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